Entre 1995 et 2007, le scientifique a suivi 6 000
volontaires âgés de 35 à 64 ans pour observer les effets du chômage sur la
santé cardiovasculaire et la mortalité globale. Les résultats ont été publiés,
en décembre, dans la revue International Archives of Occupational and
Environmental Health.
L'étude met en évidence une « surmortalité
très importante » chez les chômeurs, presque trois fois supérieure à
celle des non-chômeurs. Le chômage a notamment « des effets majeurs sur
la survenue d'accidents cardiovasculaires et de pathologies chroniques. »
« Ces effets sont bien liés à la condition de
chômeur, parce que les retraités ou les personnes volontairement inactives ne
sont pas touchées », précise le professeur Meneton. Les chômeurs ont
des « comportements à risque », explique-t-il. En moyenne, « ils
consomment plus d'alcool, moins de fruits et de légumes, et ont un apport
calorique (hors alcool) très significativement plus élevé que la moyenne. »
Mais ces résultats sont probablement « une
sous-estimation de la réalité », de l'aveu même de son auteur. Ils se
basent en effet sur un échantillon de personnes plus favorisées que la moyenne
et ne tiennent pas compte des effets de la crise économique. Aucune étude ne
donne, pour l'heure, de vision plus précise de la situation.
Partie émergée de l'iceberg, les suicides de chômeurs
font régulièrement l'actualité. Entre 2008 et 2010, 584 suicides pourraient
être attribués à la hausse du chômage, selon une étude de l'Inserm.
La santé des chômeurs est un « véritable 'trou
noir' de la connaissance scientifique et médicale », déplore le
psychiatre Michel Debout dans son livre intitulé Le traumatisme du chômage
(éditions de l'Atelier). « La santé des chômeurs semble n'intéresser
personne, dénonce-t-il, ni les professionnels de santé, ni les
chercheurs, ni surtout les pouvoirs publics, toutes sensibilités confondues.
»
C'est une « problématique importante à nos
yeux », dément le ministère du Travail, qui a récemment confié à
l'Inspection générale des affaires sociales une mission « sur la prise
en compte des problématiques de santé dans l'accompagnement des demandeurs
d'emploi. »
Dans son plan de lutte contre le chômage de longue
durée, François Rebsamen, alors ministre du Travail et de l'Emploi, prévoyait,
en outre, de « renforcer la possibilité de déclencher un bilan de santé
du demandeur d'emploi dans le cadre de son accompagnement ». »
-Bernard Gensane, "Le chômage tue davantage que les accidents de la route", 18 novembre 2018.
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