« En France la reproduction sociale est un fantasme de Bourdieu. »
-Laurent Alexandre (homme d’affaire et idéologue
transhumaniste), Thinkerview, 15
septembre 2023.
« Il y a quelques jours, c’est une chronique
parue dans Les Echos qui a relancé le débat. Son auteur,
Antoine Foucher, président de Quintet Conseil et ancien directeur de cabinet de
la ministre du Travail Muriel Pénicaud, y décrit une société française "de
rente et d’héritage" dans laquelle "la majorité de ce que les
Français possèdent est due au hasard de leur naissance, et non à leur mérite
individuel".
Pour appuyer ses propos, Antoine Foucher renvoie aux
travaux du Conseil d’analyse économique (CAE) qui a rendu un rapport
intitulé "Repenser l’héritage" fin 2021. Chargé de
conseiller le Premier ministre, ce groupe de réflexion composé d’économistes
reconnus y dresse peu ou prou le même constat: "Après un reflux des
inégalités de patrimoine et une forte mobilité économique et sociale durant la
seconde moitié du XXe siècle, l’héritage redevient un facteur déterminant dans
la constitution du patrimoine dans les pays industrialisés", écrit-il.
Les experts du CAE sont formels : "depuis une
trentaine d’années", la société sans héritage de la seconde partie du
XXe siècle "disparaît à grande vitesse" en France. "L’héritage
est de retour", résument-ils. Les chiffres en témoignent : alors que
le patrimoine représentait 300% du revenu national en 1970, il pèse aujourd’hui
600%. Et la part de la fortune héritée représente désormais 60% du patrimoine
total, contre 35% en moyenne il y a 50 ans. Le tout, sachant que la somme des
transmissions qui représentait moins de 5% du revenu national en 1950 dépasse
aujourd’hui les 15%.
"On est revenu où on en était dans les années
1920", détaillait sur BFM Business Philippe Martin, président
délégué du Conseil d’analyse économique.
Cette situation "porte le risque d’un
dérèglement profond de l’égalité des chances" car "le
patrimoine hérité est en effet plus inégalement réparti que les autres formes
de transmission qui peuvent s’opérer entre générations", poursuit le
groupe de réflexion.
D’ailleurs, la concentration du patrimoine a
clairement augmenté ces dernières années. En France, les 1% les plus
fortunés pèsent plus de 25% du patrimoine total, contre 15% en 1985. Au
cours de leur vie, 50% des Français auront hérité de moins de 70.000 de
patrimoine, alors que 10% des Français hériteront de plus de 500.000 euros. Les
1% d’héritiers les mieux lotis d’une génération recevront même 4,2 millions
d’euros en moyenne et les 0,1% environ 13 millions d’euros.
"L’héritage moyen du top 0,1 % représente donc
environ 180 fois l’héritage médian", relève le CAE. Et les 1%
d’héritiers les mieux lotis peuvent "désormais obtenir, par une simple
vie de rentier, un niveau de vie supérieur à celui obtenu" par les 1%
des "travailleurs" les mieux rémunérés. "Pour être riche
aujourd'hui (...), il est absolument fondamental d'avoir hérité",
expliquait encore Philippe Martin.
Même si la France affiche déjà "des niveaux de
taxation successorale élevés par rapport à ses voisins", selon le CAE,
Antoine Foucher suggère de "se rapprocher de l’égalité des chances en
augmentant les droits de succession sur les héritages les plus importants (par
exemple le dernier décile). »
-BFM Business, « La France est-elle redevenue une« société d’héritage » ? », 10 septembre 2023.
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